Est-il un personnage plus emblématique de la Venise du XVIII siècle que Casanova? - Venise des ors et des fêtes qui s'étourdit de plaisirs dans une Europe à la bascule de l'Histoire, Venise libertine des divertissements et des masques qui brouillent les amours et les identités, Venise des arts, de la Comedia dell arte, de l'opéra, mais aussi Venise de l'envers du décor avec ses bouges, ses prostituées, ses beuveries, ses rixes et ses tripots où se dissipe notre fieffé tricheur.
Au delà de l'image stéréotypée de l'aventurier fuyant à travers l'Europe d'alcôves en salons, de cours princières en lieux de fortune, troussant les femmes, divertissant et bernant les puissants, l'homme de théatre Casanova, artiste de sa propre vie, fut aussi un esprit des Lumières, un homme d'étude et de savoir, amoureux des livres et des bibliothèques.
Ses archives recèlent 8000 pages d'écrits, essais mathématiques et philosophiques, dialogues, correspondances... Ses Mémoires, “L'histoire de ma vie” l'imposent à la postérité comme un écrivain français majeur. Après avoir vécu une vie morcelée à la recherche effrénée de l'instant jubilatoire du pur plaisir, l'exilé vieilli et désenchanté s'immerge pendant treize ans dans la durée de la mémoire, revivant la vie qu'il avait jouée et mise en scène avec tant de panache, se jouant du temps et des lois toujours, dans le rire d'une ultime jouissance : l'écriture.